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LE CANCER DE LA VESSIE
Le cancer de la vessie et des voies urinaires est le deuxième cancer le plus fréquent en urologie. Quel traitement proposer lorsqu’on le découvre? Et que peut apporter l’immunothérapie? Le point avec le Pr Thierry Roumeguère (Urologie, HUB).
Pr Thierry Roumeguère: « Ce cancer, touche 4 fois plus souvent les hommes (à partir de 50 ans) que les femmes (à partir de 60 ans) et a pour facteur de risque principal le tabagisme, car la nicotine, est éliminée par les voies urinaires et les irrite. On distingue deux types de cancers en fonction du degré d’infiltration de la paroi: les cancers qui n’envahissent pas le muscle sont les plus fréquents, et les cancers qui l’envahissent, qui vont nécessiter un traitement différent. »
« En cas de cancer n’infiltrant pas le muscle, on injecte des produits dans la vessie (à base d’immunothérapie et/ou de chimiothérapie), tandis que pour les tumeurs envahissant le muscle, le traitement de référence à ce jour reste l’ablation de la vessie (avec la prostate chez l’homme) avec une dérivation urinaire. Cette chirurgie est généralement précédée par un traitement de chimiothérapie, qu’on appelle néoadjuvante, qui permet d’optimiser les résultats de la chirurgie. Pour les patients qui ne peuvent pas ou ne veulent pas subir l’ablation de la vessie, on proposer un traitement combinant la radiothérapie et la chimiothérapie, avec des résultats à moyen terme qui semblent au moins aussi bons que ceux de la chirurgie. »
« Certains patients précédents ont une tumeur très agressive et sont à haut risque de récidive malgré la resection de la vessie. On peut leur proposer maintenant un traitement adjuvant (après la chirurgie donc) à base d’immunothérapie, de manière à consolider la réponse de l’organisme contre le cancer et augmenter le délai avant la résurgence éventuelle de la maladie. Le mode d’action de l’immunothérapie est différent de la chimiothérapie qui s’attaque à des cellules en croissance, ce qui est le cas des cellules cancéreuses. L’immunothérapie fait appel au système immunitaire en le stimulant, en particulier certains globules blancs, les lymphocytes, dont la fonction est de débarrasser l’organisme des bactéries, des virus, ou des cellules cancéreuses. Pratiquement, les lymphocytes ont à leur surface des protéines que l’on appelle points de contrôle, qui leur permettent de ne s’attaquer qu’aux cellules cancéreuses. Mais les cellules cancéreuses peuvent accaparer ces points de contrôle et ne sont dès lors plus reconnues. L’immunothérapie que l’on utilise ici permet d’inhiber les points de contrôle, de reconnaître à nouveau les cellules cancéreuses afin d’inhiber leur croissance et leur action. Le système immunitaire peut alors refonctionner normalement. »
« Les premiers résultats, sont très encourageants pour les tumeurs de vessie à risque de récidive après chirurgie. Cependant, sous l’action de l’immunothérapie, le système immunitaire peut aussi inhiber ou détruire des cellules normales et générer des effets secondaires. Ceux-ci se produisent le plus souvent en début de traitement, potentiellement au niveau de tous les organes, avec une prédilection pour la peau, les intestins, le foie, le poumon et les organes endocriniens comme la thyroïde ou, plus rarement, l’hypophyse. Il faut donc que les patients soient informés de ce risque et surveillés de manière appropriée car la grande majorité des effets secondaires peut être traitée sans grande difficulté, et d’autant plus facilement qu’ils sont pris en charge à leur début. Lorsque ces effets secondaires persistent ou sont trop importants, le traitement sera interrompu la durée nécessaire à leur disparition. »
« Certainement, notamment pour la durée optimale du traitement, car les études sont toujours en cours on ne connaît pas encore son réel impact sur la survie globale. »
Dr Dominique-Jean Bouilliez
***références***